Cour Administrative d'Appel de Nancy 16 octobre 2014

N° 13NC02009
Inédit au recueil Lebon
3ème chambre - formation à 3
lecture du jeudi 16 octobre 2014
Mme B... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1101789 du 7 mai 2013 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Remiremont à lui verser la somme totale de 42 000 euros en réparation des préjudices subis à la suite du décès de son enfant à naître, survenu le 31 octobre 2005 ;
2°) de condamner le centre hospitalier de Remiremont à lui verser les sommes de
30 000 euros en réparation de son préjudice moral, 10 000 euros en réparation des souffrances endurées et 2 000 euros en réparation de son déficit fonctionnel temporaire ;
3°) de mettre les entiers dépens à la charge du centre hospitalier de Remiremont, ainsi qu'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Elle soutient que :
- un défaut de surveillance imputable au centre hospitalier est à l'origine du décès de son enfant ;
- elle n'a pas été informée du risque de rupture utérine en cas d'accouchement par les voies naturelles ;
- la responsabilité sans faute du centre hospitalier est engagée à raison de la défaillance du matériel de surveillance du rythme cardiaque foetal ;
Vu …

Le centre hospitalier de Remiremont fait valoir que :
- la requérante a été informée des risques présentés par son utérus cicatriciel, justifiant un accouchement par voie basse ;
- un accouchement par césarienne ne présente pas moins de risque qu'un accouchement par voie basse, si bien que la requérante n'a été privée d'aucune perte de chance ;
- aucune faute n'a été commise dans la surveillance de la parturiente ;
- la défaillance alléguée du matériel médical n'est pas à l'origine du dommage ;
Vu …

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que MmeB..., arrivée au terme de sa seconde grossesse et ressentant les premières contractions, a été prise en charge par le centre hospitalier de Remiremont, le 30 octobre 2005 à partir de 21 heures 30 minutes avant la rupture de la poche des eaux ; que pour atténuer les douleurs imputables aux contractions, une anesthésie péridurale lui a été prescrite à 23 heures 45 minutes ; que le personnel médical, alerté par le conjoint de Mme B...le lendemain vers 3 heures 20 minutes, a constaté la mort in utero du foetus quelques minutes plus tard ; que Mme B...et son conjoint, M. D... A..., agissant tant en leur nom personnel qu'en celui de leur fille mineure, E..., ont recherché la responsabilité de l'établissement hospitalier devant la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux de Lorraine, laquelle a rejeté leur demande par un avis du 24 septembre 2012, puis devant le Tribunal administratif de Nancy, qui a également rejeté leur demande par un jugement du 7 mai 2013 ; que Mme B...fait appel de ce jugement et sollicite la condamnation du centre hospitalier de Remiremont à l'indemniser de ses préjudices ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute (...) " ;
3. Considérant qu'il n'est pas contesté que Mme B...a été victime d'une rupture utérine ayant eu pour effet le décollement complet du placenta et l'asphyxie immédiate de son enfant à naître ; qu'elle soutient que le centre hospitalier de Remiremont n'a pas mis en oeuvre les mesures de surveillance adaptées à son état, alors que la cicatrice, résultant de la césarienne subie lors de la naissance de son premier enfant en 2003, l'exposait à un risque de rupture utérine ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par la commission régionale de conciliation et d'indemnisation, que les signes avant-coureurs d'une rupture utérine associent un utérus en forme de sablier, un mauvais relâchement utérin, des contractions intenses, des douleurs pelviennes malgré une anesthésie péridurale, ainsi que des anomalies du rythme cardiaque foetal ; qu'en l'espèce, les ralentissements du rythme cardiaque du foetus, constatés entre 2 heures 40 minutes et 3 heures 10 minutes, ainsi que les contractions présentées par la requérante, étaient de faible intensité ; que si Mme B...fait état de la persistance de douleurs au cours du travail, malgré l'anesthésie péridurale, l'expert indique que ces douleurs sont sans rapport avec la rupture utérine qui est intervenue ; qu'en outre, Mme B...ne présentait aucun trouble du tonus utérin ; qu'ainsi, l'intéressée ne présentait pas de symptômes précurseurs laissant supposer la survenue d'une rupture utérine ; qu'en outre, il ne résulte pas de l'instruction que la surcharge pondérale présentée par la parturiente aurait eu pour effet d'augmenter ce risque ;
5. Considérant que si Mme B...et son conjoint se trouvaient seuls en salle de travail lorsque ce dernier a constaté, à 3 heures 14 minutes, la chute brutale du rythme cardiaque de l'enfant, il résulte de l'instruction que la sage femme, qui s'occupait d'une autre patiente au sein du service, est intervenue immédiatement une fois alertée et a appelé le médecin obstétricien à 3 heures 21 minutes ; que ce médecin se trouvait aux côtés de la parturiente à 3 heures 35 minutes ; que si, selon l'expert, les anomalies du rythme cardiaque foetal, relevées avant 3 heures 10 minutes, auraient dû être signalées au médecin d'astreinte, il précise que l'intervention de celui-ci n'aurait pas permis de sauver l'enfant avant la rupture utérine, laquelle, survenue à 3 heures 14 minutes, a entrainé son asphyxie immédiate ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la surveillance dont Mme B...a fait l'objet ne révèle aucune faute dans l'organisation et le fonctionnement du service qui serait à l'origine de la rupture utérine ou d'une perte de chance, pour l'intéressée, de se soustraire au risque qui s'est réalisé ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 1111-6 du code de la santé publique : " Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. Lorsque, postérieurement à l'exécution des investigations, traitements ou actions de prévention, des risques nouveaux sont identifiés, la personne concernée doit en être informée, sauf en cas d'impossibilité de la retrouver (...) " ; que, lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé ; que, si cette information n'est pas requise en cas d'urgence, d'impossibilité ou de refus du patient d'être informé, la seule circonstance que les risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ne dispense pas les médecins de leur obligation d'information ; qu'un manquement des médecins à cette obligation engage la responsabilité de l'hôpital dans la mesure où il a privé le patient d'une chance de se soustraire au risque inhérent à l'intervention en refusant qu'elle soit pratiquée ;

8. Considérant, toutefois, qu'un accouchement par voie basse, lequel n'était pas contre-indiqué dans la situation de MmeB..., ne constitue pas un acte médical dont les risques devraient être portés préalablement à la connaissance de la future accouchée, en l'absence de risques particuliers liés à l'état de la parturiente ou de son enfant rendant prévisible l'exécution d'actes médicaux et justifiant notamment qu'un accouchement par césarienne soit envisagé ; qu'en admettant même que Mme B...n'ait pas été informée du risque de rupture utérine auquel elle était exposée en raison de la cicatrice laissée par la césarienne réalisée lors de la naissance de son premier enfant, il ne résulte en tout état de cause pas de l'instruction qu'une nouvelle césarienne aurait représenté une alternative moins risquée qu'un accouchement par voie basse ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le centre hospitalier de Remiremont a commis une faute en ne l'informant pas du risque de rupture utérine inhérent à un accouchement par voie basse ;
9. Considérant, en dernier lieu, que, sans préjudice des actions susceptibles d'être exercées à l'encontre du producteur, le service public hospitalier est responsable, même en l'absence de faute de sa part, des conséquences dommageables pour les usagers de la défaillance des produits et appareils de santé qu'il utilise ;
10. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise précité, que les défaillances techniques affectant le système d'enregistrement du rythme cardiaque foetal, survenues entre 1 heure 13 minutes et 1 heure 20 minutes, puis à 2 heures 30 minutes, sont sans rapport avec la rupture utérine constatée à 3 heures 14 minutes ; que si l'alarme du moniteur ne s'est pas déclenchée lors de la chute brutale du rythme cardiaque constatée à la même heure, cette nouvelle défaillance ne présente aucun lien avec le décès de l'enfant à naître, alors que le personnel médical, alerté par le conjoint de la requérante, est intervenu sans retard ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la responsabilité sans faute de l'établissement hospitalier serait engagée à raison de l'utilisation d'un matériel défectueux ne peut qu'être écarté ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ; qu'en outre, Mme B...étant bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, la présente instance n'a donné lieu à aucun dépens ; que, par suite, ses conclusions tendant à ce que les dépens soient mis à la charge du centre hospitalier de Remiremont ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B..., au centre hospitalier de Remiremont et à la caisse primaire d'assurance maladie des Vosges.

Cour Administrative d'Appel de Nantes 31 mars 2011

N° 10NT00884
Inédit au recueil Lebon
3ème Chambre
lecture du jeudi 31 mars 2011
Vu la requête, enregistrée le 20 avril 2010, présentée pour Mme Nadira X, épouse Y, demeurant ..., par Me Ledoux, avocat au barreau de Paris ; Mme Y demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 05-4730 du 24 février 2010 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire (CHU) d'Angers à lui verser, d'une part, la somme de 71 629,88 euros au titre de son préjudice patrimonial et, d'autre part, la somme de 48 500 euros au titre de son préjudice extra patrimonial ;
2°) de condamner le CHU d'Angers à lui verser la somme globale de 120 129,88 euros ;
3°) de mettre les frais d'expertise à la charge du CHU d'Angers ;
4°) de mettre à la charge de cet établissement la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Considérant que Mme Y, alors âgée de vingt-six ans, a été admise dans le service de gynécologie du centre hospitalier universitaire (CHU) d'Angers le 6 août 2009 pour y accoucher de son premier enfant ; que le suivi et le déroulement de la grossesse de Mme Y s'étaient déroulés dans de bonnes conditions, les examens pratiqués montrant une taille et un poids du foetus normaux ; que toutefois, l'équipe médicale du CHU d'Angers a mis en évidence quelques jours avant l'accouchement de Mme Y que l'enfant à naître se présentait en position de siège ; que l'intéressée a expressément refusé la manoeuvre proposée par l'équipe médicale, destinée à remettre l'enfant en bonne position avant l'accouchement ; que, nonobstant le souhait qu'elle avait fait connaître à l'équipe médicale d'accoucher par césarienne, Mme Y a accouché par voie basse ; que, dans les suites immédiates de cet accouchement, elle a été victime d'une hémorragie qui a eu pour conséquence la perte d'un tiers du volume de son sang et l'apparition ultérieure d'un syndrome de Sheehan, provoquant chez l'intéressée une grande fatigue et une fébrilité continue ; que Mme Y a saisi le tribunal administratif de Nantes d'une demande tendant à la condamnation du CHU d'Angers à lui verser la somme totale de 120 129,88 euros en réparation des préjudices ainsi subis ; que, par un jugement du 24 février 2010, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ; que Mme Y relève appel de ce jugement ;

Sur la responsabilité :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et en particulier du rapport remis le 13 février 2005 par l'expert désigné par le juge des référés du tribunal administratif de Nantes, que le suivi médical de l'accouchement a été réalisé dans les règles de l'art et qu'aucun élément du dossier médical de la requérante ne permettait au CHU d'Angers de prévoir la survenance d'un syndrome de Sheehan ; que la pratique d'une césarienne n'aurait pas mis la requérante à l'abri des risques d'hémorragies ; qu'il suit de là qu'en ne décidant pas de pratiquer une césarienne et en laissant la parturiente accoucher par voie naturelle le CHU d'Angers n'a commis aucune faute médicale de nature à engager sa responsabilité ;

Considérant, en second lieu, que lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé ; que, toutefois, comme l'ont retenu à bon droit les premiers juges, un accouchement par voie basse ne constitue pas un acte médical dont les risques devraient être portés préalablement à la connaissance de la future accouchée, en l'absence de risques particuliers liés à l'état de la parturiente ou de son enfant rendant prévisibles l'exécution d'actes médicaux et justifiant notamment qu'un accouchement par césarienne soit envisagé ; qu'en l'espèce, Mme Y, qui se borne à faire valoir qu'elle n'a pas été informée des suites possibles de son accouchement et ne critique aucun acte médical, n'est pas fondée à soutenir que le CHU d'Angers aurait manqué, à son égard, à son obligation d'information et aurait dû recueillir son consentement ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme Y n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Maine-et-Loire :

Considérant qu'en raison de ce qui a été dit ci-dessus les conclusions de la CPAM de Maine-et-Loire tendant à la condamnation du CHU d'Angers à l'indemniser de ses débours et au paiement de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du CHU d'Angers, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le paiement à Mme Y et à la CPAM de Maine-et-Loire des sommes qu'elles demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme Y est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées en appel par la CPAM de Maine-et-Loire sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Nadira X, épouse Y, au centre hospitalier universitaire d'Angers et à la caisse primaire d'assurance maladie de Maine-et-Loire

Cour administrative d'appel de Douai 18 décembre 2012

N° 09DA00238
Inédit au recueil Lebon
2e chambre - formation à 3
lecture du mardi 18 décembre 2012
Vu l'arrêt, en date du 16 juin 2011, par lequel la cour de céans a annulé le jugement n° 0503144 du 22 décembre 2008 rendu par le tribunal administratif d'Amiens et, avant de statuer sur les conclusions indemnitaires de M. et Mme A dirigées contre le centre hospitalier de Senlis, a ordonné une nouvelle expertise aux fins de déterminer si des fautes ont été commises dans la prise en charge de l'accouchement de Mme A le 6 mars 2003 ;

Vu …
Il soutient, en outre :
- que l'expert désigné par la cour a conclu de façon catégorique à l'absence de faute à proposer un accouchement par les voies naturelles, et à réaliser la réparation du périnée et du sphincter sous anesthésie locale plutôt que péridurale ;
- qu'il a également relevé que la rupture des points de suture est sans aucun lien avec le mode d'anesthésie employé ;
- qu'il a enfin relevé qu'aucune faute médicale n'avait été commise dans la prise en charge de Mme A avant, pendant et après son accouchement ;

1. Considérant que Mme A, alors âgée de 40 ans, a été admise le 6 mars 2003 au centre hospitalier de Senlis afin d'accoucher de son premier enfant ; qu'elle a été victime, à cette occasion, d'une déchirure périnéale et sphinctérienne, qui a été immédiatement réparée sous anesthésie locale ; que la suture sphinctérienne a dû être reprise après lâchage ; que Mme A a conservé des séquelles importantes, sous forme d'une incontinence anale sévère ; que M. et Mme A ont alors saisi le tribunal administratif d'Amiens d'une demande tendant à ce que le centre hospitalier de Senlis soit déclaré responsable de leurs préjudices respectifs résultant de ces séquelles ; que le tribunal, après avoir désigné un expert, a par un jugement du 20 décembre 2007, estimé que la responsabilité de l'établissement n'était pas engagée du fait de l'absence de consultation pré-anesthésique, ni en raison du défaut d'information des risques d'un accouchement par voie basse sans péridurale, et a ordonné une seconde expertise médicale portant sur l'intervention consécutive à l'accouchement ; que, par un jugement en date du 22 décembre 2008, le même tribunal a estimé que le personnel du centre hospitalier de Senlis n'avait commis aucune faute de nature à engager la responsabilité de cet établissement à l'occasion de cette intervention et a donc rejeté l'ensemble des demandes ; que M. et Mme A ayant relevé appel de ces jugements, la cour de céans, par arrêt du 16 juin 2011, a annulé le jugement du 22 décembre 2008 rendu par le tribunal administratif d'Amiens et, avant de statuer sur les conclusions indemnitaires de M. et Mme A dirigées contre le centre hospitalier de Senlis, a ordonné une nouvelle expertise aux fins de déterminer si des fautes avaient été commises dans la prise en charge de l'accouchement de Mme A le 6 mars 2003 ;

Sur la responsabilité du centre hospitalier de Senlis :

En ce qui concerne le défaut d'information :

2. Considérant que, lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé ; que, si cette information n'est pas requise en cas d'urgence, d'impossibilité ou de refus du patient d'être informé, la seule circonstance que les risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ne dispense pas les médecins de leur obligation ; qu'un manquement des médecins à leur obligation d'information engage la responsabilité de l'hôpital dans la mesure où il a privé le patient d'une chance de se soustraire au risque lié à l'intervention en refusant qu'elle soit pratiquée ; que, toutefois, un accouchement par voie basse, lequel n'était pas contre-indiqué dans la situation de Mme A, ne constitue pas un acte médical dont les risques devraient être portés préalablement à la connaissance de la future accouchée, en l'absence de risques particuliers liés à l'état de la parturiente ou de son enfant rendant prévisible l'exécution d'actes médicaux et justifiant notamment qu'un accouchement par césarienne soit envisagé ; que, dès lors, en l'absence, au cas d'espèce, de tout risque particulier tenant à l'état de santé de Mme A ou de l'enfant à naître, M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que le centre hospitalier de Senlis a commis une faute en ne les informant pas des risques de déchirement du sphincter inhérents à un accouchement par voie basse ;

3. Considérant, par ailleurs, qu'il résulte de l'instruction, éclairée notamment par les conclusions du troisième expert, que la mise en place d'une anesthésie péridurale, au demeurant expressément refusée par Mme A, n'a pas pour effet de faire diminuer le risque inhérent à tout accouchement par voie basse, d'une déchirure du sphincter ; que, dans ces conditions, la circonstance que Mme A n'ait pas bénéficié de la consultation pré-anesthésique prévue pour les futures parturientes ne présente aucun lien de causalité avec les préjudices dont elle demande, avec son époux, la réparation, et qui sont constitués par les conséquences dommageables de l'incontinence dont elle est atteinte depuis son accouchement ;

En ce qui concerne les fautes médicales :

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, plus spécialement éclairée par le rapport de l'expert désigné par la cour de céans, que l'incontinence anale sévère dont Mme A demeure atteinte à la suite de son accouchement a pour cause exclusive, non pas la déchirure de son sphincter, dont la réparation a été acquise après la seconde opération chirurgicale, mais un étirement distal irréversible du nerf pudendal sans lien avec la première réparation chirurgicale de son sphincter, réalisée au centre hospitalier de Senlis dans les suites immédiates de son accouchement ;

5. Considérant, par ailleurs, qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'une faute aurait été commise dans la réalisation de cette réparation chirurgicale du sphincter, nonobstant sa réalisation sous anesthésie locale et le lâchage d'un point de suture qui, à lui seul, ne saurait établir l'existence d'une telle faute alors même que l'expert désigné par la cour a relevé, après audition du chirurgien, que la méthode de suture employée était conforme aux règles de l'art ; que M. et Mme A, dont les conclusions sont au demeurant nouvelles en appel sur ce point, ne sont dès lors pas fondés à soutenir que le centre hospitalier de Senlis aurait commis une faute de nature à engager sa responsabilité à raison des préjudices résultant, pour eux, de la nécessité de subir une seconde intervention de réparation chirurgicale du sphincter ;

6. Considérant, enfin, que les requérants soutiennent que " l'expression utérine " réalisée lors de l'accouchement de Mme A, pour accélérer la délivrance, constitue une pratique prohibée et donc fautive, et a eu pour conséquence la rupture de son sphincter ; qu'il ne résulte toutefois de l'instruction ni que la réalisation de cette manoeuvre, qui n'est pas interdite mais seulement déconseillée dans un certain nombre de cas, ait présenté un caractère fautif dans le cas de l'accouchement de Mme A, ni qu'elle présente un lien de causalité avec la déchirure de son sphincter et avec les lésions neurologiques dont elle demeure atteinte ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande ;

Sur les frais de l'expertise :

8. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. L'Etat peut être condamné aux dépens. " ;

9. Considérant que, dans les circonstances particulières de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du centre hospitalier de Senlis les frais de l'expertise ordonnée par la cour de céans, tels que taxés et liquidés, par ordonnance en date du 30 janvier 2012, à la somme de 1 650 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

11. Considérant qu'en vertu des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. et Mme A doivent, dès lors, être rejetées ;

12. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions susmentionnées du centre hospitalier de Senlis ;

DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A est rejetée.
Article 2 : Les frais de l'expertise, taxés et liquidés par ordonnance du 30 janvier 2012 pour un montant de 1 650 euros, sont mis à la charge du centre hospitalier de Senlis.
Article 3 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier de Senlis en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Luc et Mme Solange A, au centre hospitalier de Senlis, à la caisse primaire d'assurance maladie de Creil et à l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM).

Cour Administrative d'Appel de Nancy 3 mai 2012

N° 11NC01141
Inédit au recueil Lebon
3ème chambre - formation à 3
lecture du jeudi 3 mai 2012
Mme A et M. B demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0901407, en date du 12 mai 2011, par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté leur requête tendant à ce que le centre hospitalier de Belfort-Montbéliard soit condamné à réparer les préjudices subis par leur fille et par eux-mêmes à la suite de la naissance en état de mort apparente de celle-ci ;
2°) à titre principal, d'ordonner une contre-expertise tendant à déterminer s'il y a eu faute médicale à la naissance de leur fille, quelles en sont les conséquences sur son état actuel et si Mme A a eu une information suffisante sur les risques d'accident et de morbidité en cas de césarienne ou d'accouchement par voie basse ;
3°) subsidiairement, de juger que Mme A n'a pas eu cette information et qu'elle a perdu une chance d'échapper au risque qui s'est réalisé ;
4°) de condamner alors le centre hospitalier de Belfort-Montbéliard à verser à Mme A la somme totale de 148 900 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'introduction de la procédure et à M. B la somme de 15 000 euros assortie des mêmes intérêts ;
5°) de condamner le centre hospitalier de Belfort-Montbéliard à leur verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Mme A et M. B soutiennent que :
- une contre-expertise est nécessaire en raison des contradictions qui existent sur la faute médicale entre le rapport de l'expert mandaté par le tribunal administratif et les conclusions de l'expert mandaté par leur compagnie d'assurance et alors qu'un doute existe sur une possible anomalie génétique préexistante qui pourrait être à l'origine de l'état actuel de Lou B ;
- Mme A, diabétique, a perdu une chance d'échapper à un risque thérapeutique pour n'avoir pas été clairement informée des conséquences possibles d'un accouchement par voie basse d'un enfant qui se présentait par le siège et des risques de recourir à une césarienne ;
- elle aurait bien évidemment choisi la voie haute et sa perte de chance est quasiment de 100 % ;
- il s'agit d'un aléa thérapeutique qui engage la responsabilité de l'établissement ;
- ses pertes de rémunération et sur sa pension de retraite, puisqu'elle doit s'occuper de sa fille, peuvent être chiffrées à un total de 133 900,92 euros, somme à laquelle il convient de rajouter un complément de préjudice pour 15 000 euros ;


La caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Saône soutient que :
- elle a droit au remboursement de la part des préjudices patrimoniaux correspondant aux frais qu'elle a engagés même si les appelants n'en font pas état ;
- elle a droit au versement de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;

Le centre hospitalier de Belfort-Montbéliard soutient que :
- l'expert intervenu devant les premiers juges écarte, expressément, l'existence d'une faute médicale lors de l'accouchement de Mme A et il n'est pas utilement contredit par les rapports d'assistance des médecins mandatés par l'assureur des requérants ;
- la grossesse de Mme A se présentant dans des conditions normales, sans risque particulier et un accouchement pas voie basse ne constituant pas un acte médical, le centre hospitalier n'avait pas à l'informer de l'existence de risques particuliers ;
- les appelants n'établissent pas la réalité et l'étendue des préjudices qu'ils allèguent ;


Sur la responsabilité :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des rapports des experts intervenus devant les premiers juges que le suivi de la grossesse de Mme A et son accouchement ont été gérés dans les règles de l'art par le centre hospitalier de Belfort-Montbéliard qui n'a commis aucune faute médicale, de soins ou dans l'organisation et le fonctionnement du service ; que si les appelants soutiennent qu'un expert intervenu à titre privé s'est interrogé sur la succession des manoeuvres réalisées par le praticien accoucheur, qui pourrait révéler un retard fautif, cette circonstance est toutefois démentie par les premiers experts qui relèvent qu'un accouchement du siège par voie basse, comme tout autre accouchement, peut présenter des complications, ce praticien accoucheur ayant dû, dans le cas de Mme A, accélérer manuellement l'expulsion, qui se présentait jusqu'alors de manière normale, à la suite d'anomalies subites répétées du rythme cardiaque foetal et de l'insuffisance des efforts de la parturiente ;
Considérant, en deuxième lieu, que lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé ; que, toutefois, comme l'ont retenu à bon droit les premiers juges, un accouchement par voie basse, lequel n'était pas contre-indiqué dans la situation de Mme A, ne constitue pas un acte médical dont les risques devraient être portés préalablement à la connaissance de la future accouchée, en l'absence de risques particuliers liés à l'état de la parturiente ou de son enfant rendant prévisibles l'exécution d'actes médicaux et justifiant notamment qu'un accouchement par césarienne soit envisagé ; qu'en l'espèce, Mme A, qui se borne à faire valoir que son enfant se présentait par le siège et qu'elle n'a pas été informée des suites possibles de son accouchement et ne critique aucun acte médical, n'est pas fondée à soutenir que le centre hospitalier de Belfort-Montbéliard aurait manqué, à son égard, à son obligation d'information et aurait dû recueillir son consentement ;

Considérant, enfin, que Mme A et M. B entendent également, dans de dernières écritures, obtenir la condamnation du centre hospitalier de Belfort-Montbéliard en l'absence de faute sur le fondement de l'aléa thérapeutique ;

Considérant que lorsqu'un acte médical nécessaire au diagnostic ou au traitement du malade présente un risque dont l'existence est connue mais dont la réalisation est exceptionnelle et dont aucune raison ne permet de penser que le patient y soit particulièrement exposé, la responsabilité du service public hospitalier est engagée si l'exécution de cet acte est la cause directe de dommages sans rapport avec l'état initial du patient comme avec l'évolution prévisible de cet état, et présentant un caractère d'extrême gravité ; que, comme cela a été dit précédemment, un accouchement par voie basse ne constitue pas un acte médical ; que les conclusions des appelants présentées au titre de la responsabilité sans faute du centre hospitalier ne peuvent dès lors qu'être écartées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une contre-expertise qui n'apparaît pas utile à la solution du litige, que Mme A et M. B ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Saône :

Considérant qu'en raison de ce qui a été dit ci-dessus, les conclusions de la CPAM de la Haute-Saône tendant à la condamnation du centre hospitalier de Belfort-Montbéliard à l'indemniser de ses débours et au paiement de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier de Belfort-Montbéliard, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, les sommes que demandent Mme A et M. B ainsi que la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Saône au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A et de M. B et les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Saône sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Catherine A, à M. Fabrice B, à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Saône et au centre hospitalier de Belfort-Montbéliard.

Cour administrative d'appel de Douai 3 juillet 2007

N° 06DA01178
Inédit au recueil Lebon
2e chambre - formation à 3 (bis)
lecture du mardi 3 juillet 2007
Vu la requête, enregistrée le 25 août 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel
de Douai, présentée pour Mme Sylvianne , et M. David , demeurant ..., par Me Titran ; M. et Mme demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0303823 du 20 juin 2006 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à ce que le centre hospitalier de la région de Saint-Omer soit condamné à leur verser à chacun la somme de 23 000 euros en réparation du préjudice moral résultant de la perte de leur enfant et à verser à Mme la somme de 4 000 euros en réparation du préjudice ayant résulté pour elle du caractère particulièrement violent des gestes d'aide à l'expulsion réalisés par le médecin et la sage-femme ;
2°) de condamner le centre hospitalier de la région de Saint-Omer à leur verser à chacun la somme de 23 000 euros en réparation du préjudice moral résultant de la perte de leur enfant et à verser à Mme la somme de 4 000 euros en réparation du préjudice ayant résulté pour elle du caractère particulièrement violent des gestes d'aide à l'expulsion réalisés par le médecin et la sage-femme ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de la région de Saint-Omer la somme de
2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que le raisonnement suivi par le Tribunal n'est pas très compréhensible lorsqu'il indique que la dystocie des épaules n'est pas la conséquence d'un acte médical ; qu'ils demandent non la réparation de la dystocie des épaules mais la réparation du préjudice lié à la mort de leur enfant et résultant de l'accouchement ; que c'est bien l'acte d'accouchement par voie basse dont il convient d'apprécier les conséquences ; que le blocage de l'enfant dans le bassin de la mère constitue au sens de la jurisprudence la réalisation d'un risque exceptionnel non prévisible dont l'existence est connue ; que le dommage subi est sans rapport avec l'état initial de la patiente ; que la Cour accordera donc aux exposants le bénéfice de la responsabilité sans faute ;

Vu le mémoire en défense, enregistré par télécopie le 1er mars 2007 et confirmé par la production de l'original le 2 mars 2007, présenté pour le centre hospitalier de la région de
Saint-Omer dont le siège est situé rue Blendecques à Helfaut (62570), par Me Le Prado ; le centre hospitalier de la région de Saint-Omer conclut au rejet de la requête ; il soutient que le préjudice en cause n'est pas au nombre de ceux qui ouvrent droit à réparation en l'absence de faute du service public hospitalier ; que lorsque l'accouchement est perturbé par cette complication, la responsabilité du service public hospitalier ne peut être recherchée que sur le fondement de la faute ; que le blocage de l'enfant dans le bassin de sa mère n'est pas le fait d'un acte médical, mais d'un événement naturel ; que les requérants ne critiquent pas la nécessité dans laquelle s'est trouvée le praticien de recourir à la manoeuvre de Jacquemier ; qu'ils ne font état d'aucune erreur dans la mise en oeuvre des manipulations obstétricales ; qu'aucune condition d'engagement de la responsabilité sans faute n'est remplie ; qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le choix de l'accouchement par voie basse était erroné ; qu'au surplus cette méthode doit être privilégiée par rapport à l'accouchement par césarienne qui comporte plus de risques ; qu'il n'est malheureusement pas rare que les manoeuvres préconisées se révèlent insuffisantes pour sauver l'enfant à naître ;
Vu l'ordonnance en date du 19 mars 2007 fixant la clôture d'instruction au 30 avril 2007, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Considérant que Mme a été admise à la maternité du centre hospitalier de Saint-Omer le 11 décembre 1998 en vue de son accouchement ; que le travail s'est effectué spontanément ; que la hauteur utérine était normale et qu'il n'y avait aucun signe de macrosomie ; que l'enfant s'étant présenté par la tête, l'accouchement par voie basse a débuté à 23 h 00 ; que l'obstétricien a cependant dû réaliser un forceps pour faciliter l'expulsion, mais a été confronté à une dystocie des épaules, l'enfant s'étant retrouvé bloqué dans le bassin de sa mère ; que le praticien a pratiqué alors la manoeuvre dite de Jacquemier, mais l'enfant est né en état de mort apparente ; qu'il est décédé dans les heures qui ont suivi son admission au centre de réanimation néo-natale de l'hôpital de Calais ; que M. et Mme ont saisi le Tribunal administratif de Lille sur le seul fondement de la responsabilité sans faute et font appel de son jugement qui a rejeté leur demande ;

Considérant que les requérants font valoir que l'accouchement par voie basse en milieu hospitalier est toujours un acte médical et que, en l'espèce, son exécution a été la cause directe de la mort de l'enfant à naître ; que la dystocie des épaules présentée par l'enfant avait le caractère d'un risque exceptionnel et imprévisible, et que son décès constitue un dommage sans aucun rapport avec l'état prévisible de la mère engageant la responsabilité sans faute du centre hospitalier de la région de Saint-Omer ;

Considérant que, lorsqu'un acte médical nécessaire au diagnostic ou au traitement du malade présente un risque dont l'existence est connue mais dont la réalisation est exceptionnelle et dont aucune raison ne permet de penser que le patient y soit particulièrement exposé, la responsabilité du service public hospitalier est engagée si l'exécution de cet acte est la cause directe de dommages sans rapport avec l'état initial du patient comme avec l'évolution prévisible de cet état, et présentant un caractère d'extrême gravité ;

Considérant que, d'une part, un accouchement par voie basse ne constitue pas un acte médical dont les risques devraient être portés préalablement à la connaissance de la future accouchée en l'absence de risques particuliers liés à l'état de la parturiente ou de son enfant, rendant prévisibles l'exécution d'actes médicaux et justifiant notamment qu'un accouchement par césarienne soit envisagé ; que, d'autre part, la dystocie des épaules pouvant être présentée par l'enfant à naître n'est pas la conséquence d'un acte médical, mais constitue une circonstance de fait qui n'est pas de nature par elle-même à fonder un droit à réparation ; que, par suite, la responsabilité sans faute du centre hospitalier de la région de Saint-Omer ne pouvait être engagée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. » ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. et Mme doivent dès lors être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Sylvianne , à M. David , au centre hospitalier de la région de Saint-Omer et à la caisse primaire d'assurance maladie de Calais.

Cour administrative d'appel de Nancy 9 novembre 2006

N° 05NC01579
Inédit au recueil Lebon
3EME CHAMBRE - FORMATION A 3
lecture du jeudi 9 novembre 2006
Vu la requête, enregistrée au greffe le 22 décembre 2005, présentée pour Mme Floriane Estelle X et M. Pascal Bernard X, élisant domicile ..., par le cabinet Derowski, avocats ;
M. et Mme X demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 18 octobre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Reims à réparer les conséquences dommageables des fautes commises par le service public hospitalier lors de la naissance de leur fille Amélie ;
2°) de déclarer le centre hospitalier universitaire de Reims entièrement responsable des lésions survenues à leur fille lors de sa naissance ;
3°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Reims à leur verser en leur qualité de représentants de leur fille une indemnité provisionnelle de 300 000 euros à valoir sur le préjudice corporel et moral subi par celle-ci et une indemnité provisionnelle de 8 000 euros au titre de leur propre préjudice moral ;
4°) d'ordonner en tant que de besoin une contre-expertise pour déterminer les fautes médicales imputables au service public hospitalier et, en tout cas, une nouvelle expertise pour déterminer le préjudice subi par l'enfant et par les parents ;
5°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Reims à leur payer une somme de 3 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :
- le tribunal a fait une inexacte appréciation des faits, comme il ressort du rapport d'expertise du Docteur Yqui confirme l'existence de fautes médicales et d'un manquement à l'obligation d'information ;
- d'une part, l'équipe médicale a fait une erreur dans le choix de la méthode d'accouchement car elle aurait dû, compte tenu des éléments cliniques constatés bien avant l'accouchement, poser par prudence l'indication d'une césarienne et non d'un accouchement par voie naturelle ; d'autre part, les manoeuvres d'extraction foetale ont été réalisées avec force comme l'attestent les lésions du plexus brachial dont a été victime l'enfant ;
- il est déplorable que le mode d'accouchement ait été décidé en urgence et non au stade de l'admission ;
- enfin, le défaut d'information sur les modalités de l'accouchement et ses éventuelles conséquences est établi, comme l'indique le rapport de l'expert désigné par le tribunal, s'agissant notamment du risque que présente l'accouchement par voie basse ; c'est à tort que le tribunal a estimé qu'il y avait urgence alors que l'information aurait dû être faite au tout début de l'accouchement ;
- une nouvelle expertise est nécessaire pour déterminer le préjudice corporel de l'enfant qui est âgée de huit ans ;

La caisse primaire d'assurance maladie de la Marne conclut :

1°) à l'annulation du jugement en tant qu'il a rejeté sa demande tendant au remboursement de ses débours ;
2°) à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Reims à lui verser une somme de 35 459,46 €, avec les intérêts légaux à compter de la date de sa demande, au titre des dépenses exposées au profit de la jeune Amélie X ;
3°) à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Reims à lui verser une somme de 910 € au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par l'ordonnance du 24 janvier 1996 modifiée par la loi du 19 décembre 2005 et une somme de 750 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :
- sa requête est recevable en appel même si elle n'a pas interjeté appel dans les délais du recours contentieux ;
- la caisse a exposé des frais qui sont attestés par le relevé produit aux débats ;


Le centre hospitalier universitaire de Reims conclut au rejet de la requête de M. et Mme X et des conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de la Marne.
Il soutient que :
- le premier rapport d'expertise du docteur Z rédigé à la demande de M.A.I.F. a été pris en compte par l'expert désigné par le tribunal ; l'expertise du professeur A était parfaitement contradictoire ;
- les critiques énoncées par le second rapport du docteur Z ne sont pas fondées ; l'équipe obstétricale n'avait aucun motif impératif de fixer le choix de la méthode d'accouchement dès l'admission de la requérante puisque les praticiens avaient l'obligation de retarder l'accouchement pour favoriser la maturation foetale ; de plus, le docteur Z ne tient pas compte de la rapidité avec laquelle les événements se sont précipités et notamment l'accélération de la dilatation dans la soirée du 10 décembre 1998 ;
- selon les paramètres obstétricaux et foetaux, l'indication d'un accouchement par voie basse était justifiée ;
- en outre, l'extraction par césarienne aurait nécessité des manoeuvres et n'aurait pas évité totalement le risque de paralysie du plexus brachial ;
- si le rapport de l'expert évoque un probable défaut d'information, l'accouchement par voie naturelle ne constitue pas un acte médical dont les risques doivent être portés préalablement à la connaissance de la future accouchée ; en outre, l'équipe était confrontée à une situation d'urgence en raison de la soudaineté et de la rapidité du déclenchement naturel de l'accouchement ;
- les conclusions indemnitaires des consorts X ne sont assorties d'aucune justification ni dans leur principe ni dans leur montant ;
- la demande de contre-expertise devra être rejetée compte tenu du rapport complet établi par l'expert désigné par le tribunal ;
- les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Marne sont en tout état de cause irrecevables dès lors que la caisse n'a pas chiffré ses débours avant le jugement ;

Considérant que Mme X a été hospitalisée au centre hospitalier universitaire de Reims le 8 décembre 1998, après rupture prématurée de la poche des eaux et alors qu'elle se trouvait à 7 mois et 4 jours de grossesse ; qu'après que des soins avaient été donnés durant deux jours aux fins de retarder la naissance et de permettre la maturation du foetus, Mme X a accouché le soir du 10 décembre suivant vers 22 heures ; que dans les suites de cet accouchement, qui s'est déroulé par voie basse avec présentation par le siège, sa fille Amélie a présenté des lésions du plexus brachial droit dont elle demeure atteinte ; que M. et Mme X relèvent appel du jugement en date du 18 octobre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Reims à réparer les conséquences dommageables des fautes qu'ils imputent aux services du centre hospitalier ;

Sur les fautes médicales :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise du professeur A désigné par ordonnance du président du tribunal administratif, que, malgré la mise en place d'un traitement adapté pour prévenir un accouchement prématuré, le praticien s'est trouvé confronté le 10 décembre 1998 à partir de 17 heures à une reprise très rapide du travail et à partir de 19 heures à une accélération de la dilatation du col de l'utérus, laquelle a été complète vers 21h30 ; que, compte tenu du déroulement de cette phase de travail et de la petite taille attendue de l'enfant, ainsi que des paramètres cliniques de la mère et de l'enfant, qui étaient normaux, la décision de l'équipe obstétricale de pratiquer un accouchement par voie basse, conforme aux données de la science médicale, alors même que certains facteurs tels que notamment la prématurité de l'enfant et la rupture des membranes pouvaient militer en faveur d'une césarienne, n'a pas revêtu, dans ces circonstances, le caractère d'une faute médicale de nature à engager la responsabilité du service public hospitalier ; que contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'équipe obstétricale, qui avait l'obligation de retarder l'accouchement pour favoriser la maturation foetale, n'était pas tenue de fixer dès l'admission de la parturiente les modalités de l'accouchement et n'était pas davantage tenue de poser à ce moment l'indication d'une césarienne, laquelle, au demeurant, présente elle-même des risques non négligeables de lésion du plexus brachial lors de l'extraction de l'enfant ;
Considérant, en second lieu, qu'il n'est pas contesté que la paralysie du plexus brachial est une complication directe de l'accouchement et notamment des manoeuvres de rotation du foetus ; que, cependant, si les requérants font valoir que le traumatisme s'est traduit par une rupture des racines supérieures du plexus brachial et qu'en outre, le bassin de l'accouchée aurait été, selon ses dires, soulevé de la table d'opération, ils n'établissent cependant pas que ces manoeuvres auraient été réalisées avec force alors qu'il résulte au contraire de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du professeur A, que ces manoeuvres d'extraction, habituellement préconisées, ont été exécutées, dans un contexte de prématurité et de fragilité du foetus, de façon appropriée et selon les règles de l'art ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal a écarté leurs prétentions sur le fondement de la faute médicale ;

Sur la faute liée au défaut d'information :

Considérant que lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé ; que, si cette information n'est pas requise en cas d'urgence, d'impossibilité ou de refus du patient d'être informé, la seule circonstance que les risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ne dispense pas les praticiens de leur obligation ;

Considérant qu'à supposer même que les risques inhérents à un accouchement par les voies naturelles mais dans un contexte de prématurité fussent au nombre des risques que l'équipe obstétricale aurait dû porter à la connaissance de la parturiente, il résulte de l'instruction, ainsi qu'il a été dit plus haut, que le choix du mode d'accouchement a été effectué dans une situation d'urgence marquée par une accélération inopinée des contractions utérines et par la rapidité de la phase de dilatation ; que, dans ces conditions et en tout état de cause, alors même que Mme X aurait souhaité accoucher par césarienne eu égard aux inconvénients supposés moindres que présente ce mode d'accouchement pour l'enfant, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal a considéré que le centre hospitalier universitaire n'avait pas manqué à son obligation d'information ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise, que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leurs conclusions à fin d'indemnité ; que par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le centre hospitalier universitaire de Reims, les conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de la Marne tendant au remboursement de ses débours et au versement de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que le centre hospitalier universitaire de Reims, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser aux consorts X et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Marne la somme qu'ils réclament au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :
Article 1er : La requête susvisée de M. et Mme X et les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Marne sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Pascal X, au centre hospitalier universitaire de Reims, à la mutuelle générale de l'éducation nationale et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Marne.


Cour administrative d'appel de Douai 30 mai 2006

N° 05DA00239
Inédit au recueil Lebon
2E CHAMBRE - FORMATION A 3
lecture du mardi 30 mai 2006
Vu la requête, enregistrée le 24 février 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Y... épouse , demeurant ..., par Me A... ; Mme demande à la Cour:
1) d'annuler le jugement n° 0202404 en date du 30 novembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à ce que le centre hospitalier régional de Lille soit déclaré responsable des conséquences dommageables de son accouchement survenu le 14 mai 2000, de le condamner à lui verser la somme de 7 500 euros à titre de provision et de désigner un expert afin de chiffrer son préjudice ;
2°) de déclarer le centre hospitalier régional de Lille responsable des conséquences dommageables de son accouchement, de le condamner à lui verser la somme de 7 500 euros à titre de provision et de désigner un expert afin de chiffrer son préjudice ;

Elle soutient :
- que la responsabilité du centre hospitalier est engagée sur le terrain de la faute ; que le rapport de l'expert indique en effet que l'échographie du 8 février 2000 prévoyait à cette époque un bébé d'un poids au-dessus de la moyenne ; qu'il existait ainsi des signes cliniques laissant supposer un problème ; qu'une césarienne était dès lors indiquée ; qu'il y a eu, en outre, faute pour défaut de consentement éclairé puisque l'exposante n'a pas été informée des suites possibles ;
- que la responsabilité sans faute du centre hospitalier est engagée ; qu'en effet, contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal, les séquelles conservées sont d'une extrême gravité ; qu'elle a présenté des troubles moteurs des membres inférieurs et une déchirure du sphincter anal à l'origine d'une incontinence qui a nécessité un suivi et une rééducation sphinctérienne intensive et longue ; que l'expert a précisé que l'incontinence n'est jugulée qu'au prix d'un régime alimentaire strict et d'une rééducation d'entretien ; qu'en outre, elle a dû subir une hystérectomie alors qu'elle n'est âgée que de 32 ans et souhaitait avoir un troisième enfant ; qu'elle a subi le 30 novembre 2004 de nouvelles interventions en rapport avec son incontinence ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 février 2006, présenté pour le centre hospitalier de Lille, dont le siège est ..., par Me Le Prado ; le centre hospitalier de Lille demande à la Cour de rejeter la requête ;

Il soutient :
- en premier lieu, que la requérante ne critique pas l'opinion de l'expert selon laquelle il n'y a pas eu de faute médicale dans l'appréciation du poids foetal de naissance ; que l'expert a indiqué qu'aucun facteur de risque ne pouvait laisser supposer une macrosomie et qu'en outre, l'opportunité d'une césarienne ne revêt aucun caractère systématique dans le cas de diagnostic de macrosomie foetale ; qu'une césarienne pratiquée avant le travail multiplie par deux le risque de mortalité et morbidité ; que pratiquée pendant le travail, elle fait courir un risque hémorragique qu'il convenait d'éviter compte tenu des antécédents de la requérante ; que c'est donc à bon droit que les premiers juges ont retenu l'absence de faute tant dans l'évaluation du poids de l'enfant que dans le choix de la méthode d'accouchement ;
- que la requérante n'est pas davantage fondée à rechercher la responsabilité de l'exposant pour défaut d'information des complications apparues à l'occasion de son accouchement ; qu'un accouchement par voie basse est en effet la pratique naturelle et générale, le recours à la césarienne devant être réservé aux cas où l'accouchement normal présente des dangers sérieux ; qu'un défaut d'information fautif ne peut être retenu que si l'accouchement par voie basse comporte effectivement des risques prévisibles en raison de l'anatomie de la parturiente ou des antécédents révélés lors de précédents accouchements ; que tel n'est pas le cas en l'espèce ;
- que la responsabilité sans faute de l'exposant n'est pas engagée ; que les troubles moteurs des membres inférieurs constatés après l'accouchement ont régressé spontanément ; que l'hystérectomie est intervenue après l'échec de toute autre méthode utilisable pour faire cesser l'hémorragie qui mettait en jeu le pronostic vital de la patiente ; que la taille du bébé n'a pas été le seul facteur de cette complication ; que l'intervention dont fait état la requérante n'étant pas liée à l'accouchement, les séquelles de celui-ci se résument à l'incontinence anale qui ne caractérise pas un dommage d'une extrême gravité ; qu'en outre, ce dommage n'est pas sans lien avec l'évolution prévisible de l'état antérieur de la requérante ;

Sur la responsabilité pour faute :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert désigné par ordonnance du juge des référés du Tribunal administratif de Lille en date du
22 août 2001, que la grossesse de Mme Y... , qui ne présentait aucun facteur de risque d'une macrosomie foetale, a fait l'objet d'un suivi effectué dans les règles de l'art et qu'en ne prévoyant pas un accouchement par césarienne au lieu d'un accouchement par voie naturelle, le centre hospitalier de Lille n'a commis aucune faute médicale de nature à engager sa responsabilité ;

Considérant, en second lieu, que lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé ; que, toutefois, comme l'ont retenu à bon droit les premiers juges, un accouchement par voie basse ne constitue pas un acte médical dont les risques devraient être portés préalablement à la connaissance de la future accouchée en l'absence de risques particuliers liés à l'état de la parturiente ou de son enfant, rendant prévisibles l'exécution d'actes médicaux et justifiant notamment qu'un accouchement par césarienne soit envisagé ; qu'en l'espèce, Mme qui se borne à faire valoir qu'elle n'a pas été informée des suites possibles de son accouchement et ne met en cause l'exécution d'aucun acte médical n'est pas fondée à soutenir que le centre hospitalier aurait manqué, à son égard, à son obligation d'information ;

Sur la responsabilité sans faute :

Considérant que lorsqu'un acte médical nécessaire au diagnostic ou au traitement d'un malade présente un risque dont l'existence est connue mais dont la réalisation est exceptionnelle et dont aucune raison ne permet de penser que le patient y soit particulièrement exposé, la responsabilité du service public est engagée si l'exécution de cet acte est la cause directe de dommages sans rapport avec l'état initial du patient comme avec l'évolution prévisible de cet état, et présentant un caractère d'extrême gravité ;

Considérant, d'une part, que les séquelles dont Mme reste atteinte du fait de la déchirure du sphincter anal qui s'est produite au cours de son accouchement, et alors, au demeurant, qu'elle ne met en cause l'exécution d'aucun acte médical, pour importantes et invalidantes qu'elles soient, ne présentent pas un caractère d'extrême gravité de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier ; que Mme ne peut, d'autre part, se prévaloir des troubles moteurs dont elle n'a été que temporairement atteinte ; qu'il résulte, enfin, de l'instruction et notamment des circonstances du premier accouchement de la requérante, que les dommages résultant de l'hystérectomie, qui a été réalisée en raison de la survenance d'une hémorragie de la délivrance, ne peuvent, en tout état de cause, être regardés comme étant sans lien avec l'état initial de l'intéressée ; qu'il suit de là que Mme n'est pas fondée à soutenir que la responsabilité sans faute du centre hospitalier régional de Lille est engagée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier régional de Lille, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, la somme que demande Mme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme Y... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Y... , au centre hospitalier régional de Lille et à la caisse primaire d'assurance maladie de Lille.