Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du mardi 1 avril 2003

N° de pourvoi: 01-00575
Publié au bulletin Rejet.

Donne acte à l'Etablissement français du sang du désistement de son pourvoi formé contre la CPAM du Val-de-Marne, la compagnie Axa assurances et de la compagnie AGF ;

Sur le moyen unique pris en ses deux branches :

Attendu que Mme X... a subi les 6 et 10 juillet 1982 deux transfusions sanguines lors d' une intervention chirurgicale et qu'en décembre 1993 une hépatite C a été diagnostiquée ; que les deux experts nommés afin de déterminer s'il existait un lien entre les transfusions et la contamination ayant conclu que la contamination était en rapport avec ces transfusions, Mme X... a fait assigner le CDTS qui a appelé ses assureurs les compagnies Axa et AGF en garantie ;

Attendu que le CDTS fait grief à l'arrêt (Metz, 7 septembre 2000) de l'avoir condamné à payer à Mme X... une somme de 1 500 000 francs en réparation de son préjudice de contamination alors, selon le moyen :

1 ) que la contamination par le virus de l'hépatite C ne constitue pas un préjudice indemnisable indépendamment des dommages qui en résultent et qu'en statuant comme elle l'a fait la cour d'appel a violé les dispositions des articles 1147 du Code civil et de l'article 47-I et III du 31 décembre 1991 ;

2 ) que le préjudice de contamination constitue un préjudice de caractère personnel et en énonçant pour retenir l'existence d'un tel préjudice que Mme X... avait dû à raison de la dégradation de son état de santé, passer à une activité professionnelle à mi-temps avant de cesser toute activité , la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ensemble les dispositions de l'article 47-I et III de la loi du 31 décembre 1991 ;

Mais attendu que les juges du fond qui ont constaté que Mme X... souffrait d'une hépatite C chronique à un stade avancé et énoncé les nombreuses incidences et risques d'évolution de cette maladie ont exactement jugé, que les différents éléments constitutifs d'un préjudice spécifique de contamination étaient réunis en l'espèce et ont souverainement décidé que la somme allouée de ce chef correspondait à une juste évaluation du préjudice personnel tenant aux souffrances endurées à la suite des traitements mis en oeuvre ainsi qu'aux perturbations et craintes endurées ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

Publication : Bulletin 2003 I N° 95 p. 73

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 24 septembre 2009

N° de pourvoi: 08-17241
Publié au bulletin Rejet

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que blessé au cours d'un accident de la circulation le 12 juillet 1987, M. Jean-Pierre X... a subi des transfusions sanguines ; qu'ayant appris qu'il était atteint par le virus de l'hépatite C, il a assigné en indemnisation l'Etablissement français du sang (EFS), venu aux droits du centre de transfusion sanguine de Brest, lequel a appelé en cause son assureur, la Société mutuelle d'assurance des collectivités locales (SMACL), en présence de la caisse primaire d'assurance maladie du Sud Finistère (la caisse) ;

Attendu que l'EFS fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à M. X... la somme de 85 000 euros au titre de son déficit fonctionnel et la somme de 120 000 euros au titre de son préjudice spécifique de contamination par le virus de l'hépatite C, alors, selon le moyen, que le préjudice spécifique de contamination par le virus de l'hépatite C recouvre l'ensemble des préjudices de caractère personnel, tant physiques que psychiques, consécutifs à l'infection virale ; qu'il inclut par conséquent le déficit fonctionnel, qui correspond aux incidences, sur la sphère personnelle de la victime, de la réduction définitive de son potentiel physique, psycho-sensoriel ou intellectuel ; qu'en indemnisant à la fois le déficit fonctionnel de M. X... et son préjudice spécifique de contamination par le virus de l'hépatite C, la cour d'appel, qui a réparé deux fois le même dommage, a violé l'article 1147 du code civil et le principe de réparation intégrale ;

Mais attendu que le préjudice spécifique de contamination par le virus de l'hépatite C comprend l'ensemble des préjudices de caractère personnel tant physiques que psychiques résultant de la contamination, notamment les perturbations et craintes éprouvées, toujours latentes, concernant l'espérance de vie et la crainte des souffrances ; qu'il comprend aussi le risque de toutes les affections opportunistes consécutives à la découverte de la contamination, les perturbations de la vie sociale, familiale et sexuelle et les dommages esthétique et d'agrément générés par les traitements et soins subis ; qu'il n'inclut pas le préjudice à caractère personnel du déficit fonctionnel, lorsqu'il existe ;

Et attendu que l'arrêt, sous une rubrique "préjudices extra-patrimoniaux", retient d'une part au titre du poste "déficit fonctionnel", que M. X... , âgé de 55 ans à la consolidation, reste atteint d'un déficit de 55 % et qu'il lui est alloué la somme de 85 000 euros, d'autre part au titre du poste "préjudice de contamination", que le caractère spécifique de la contamination ne peut recevoir indemnisation selon les normes usuellement admises en matière de dommage corporel, et qu'outre les douleurs physiques, ce préjudice inclut les douleurs morales résultant de la contamination, ses conséquences sur la vie professionnelle devenue inexistante à une époque où M. X... était encore en droit d'espérer travailler plusieurs années , ses conséquences aussi sur la vie sociale et de loisir ralentie depuis de très nombreuses années du fait de l'asthénie et des contraintes liées aux traitements, ainsi que la crainte légitime d'une évolution défavorable de son état de santé vers une cirrhose, comme il a déjà connu un cancer du foie, alors que les premiers symptômes de la maladie ont débuté en 1988, M. X... n'étant âgé que de 37 ans, et alors que malgré la greffe du foie, le virus est toujours présent et que, néanmoins, son état est stabilisé depuis l'année 2006 ; que, compte tenu de ces éléments, il y a lieu de lui allouer la somme de 120 000 euros ;

Que la cour d'appel, qui a ainsi constaté souverainement, par un arrêt motivé vérifiant leurs éléments constitutifs distincts, l'existence des deux postes de préjudices à caractère personnel du déficit fonctionnel et du préjudice spécifique de contamination, en a exactement déduit qu'ils devaient faire l'objet d'une indemnisation distincte ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

Publication : Bulletin 2009, II, n° 226