Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du mercredi 16 janvier 2013

N° de pourvoi: 12-15452
Non publié au bulletin Rejet


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 janvier 2012), que, le 19 juillet 2005, Mme X..., enceinte d'environ huit mois, a été hospitalisée en raison de signes de pré-éclampsie à l'hôpital privé de Seine-Saint-Denis, que, Mme Y..., gynécologue-obstétricien, ayant décidé de déclencher le travail, une anesthésie péridurale a été mise en place par M. Z..., médecin anesthésiste, mais que, des signes de souffrance foetale aiguë étant apparus, et Mme Y... ayant décidé à de pratiquer une césarienne, ce dernier a posé une rachianesthésie ; que l'arrêt indique encore qu'après l'extraction de l'enfant, en état de mort apparente mais qui a pu être ranimé, sans séquelle, Mme X... a présenté un arrêt cardio-respiratoire, que, prise en charge par M. Z... ainsi que par deux autres anesthésistes présents dans l'établissement, elle a été transférée dans une service de réanimation, qu'atteinte d'une encéphalopathie de type anoxique, elle en conserve de très lourdes séquelles ;

Attendu que M. X..., son époux, et sa mère, Mme A... (les consorts X...), tant en leur nom personnel qu'en qualité de tuteurs de Mme X..., après que la procédure amiable d'indemnisation n'eut pas abouti, l'ONIAM ayant refusé de substituer l'assureur défaillant, ont recherché la responsabilité de M. Z... et de son assureur, la société Inter Hannover, ainsi que celle de l'hôpital privé de Seine-Saint-Denis et de la société Axa France IARD, son assureur ; que M. Z... et son assureur ont appelé en garantie Mme Y... ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que M. Z... et la société Inter Hannover font grief à l'arrêt de les condamner, in solidum, à réparer le dommage subi par Mme X... ainsi qu'à verser certaines sommes à la CPAM de Seine-Saint-Denis, alors, selon le moyen :

1°/ que le médecin anesthésiste ne peut être condamné à supporter l'intégralité du dommage subi par un patient que si le lien de causalité entre la faute qui lui est imputée et le dommage, est direct et certain ; que pour condamner M. Z... à réparer l'entier préjudice de Mme X..., la cour d'appel a énoncé que la rachianesthésie qu'il avait pratiquée était la cause la plus " probable " de l'accident cardio-circulatoire dont Mme X... avait été victime, tout en relevant que l'embolie amniotique, moins probable et imprévisible ne pouvait être écartée faute de recherche en ce sens ; que la cour d'appel n'a pas caractérisé le lien de causalité direct et certain entre la rachianesthésie pratiquée par M. Z... et l'accident cardio-circulatoire dont la patiente a été victime et a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

2°/ que ce n'est qu'en cas de responsabilité du fait d'un produit défectueux que le rôle causal de ce produit peut se déduire de simples présomptions graves précises et concordantes ; qu'en adoptant les motifs des premiers juges retenant l'existence de présomptions précises graves et concordantes leur permettant d'affirmer que le dommage était en lien de causalité avec les fautes reprochées à M. Z... et en le condamnant à réparer l'entier dommage subi par Mme X..., la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu que, par motifs propres et adoptés, la cour d'appel a relevé, au vu des rapports d'expertise, que les fautes commises par M. Z..., lequel, en contradiction avec les bonnes pratiques de sa spécialité, avait pratiqué une rachianesthésie à la suite d'une anesthésie péridurale, avait effectué une ponction à un niveau du rachis trop élevé et avait utilisé une dose de produit supérieure à la dose recommandée, expliquaient de façon scientifique et objective la survenue d'une rachianesthésie totale, et que celle-ci apparaissait, selon les experts, être la cause la plus probable de l'accident cardio-circulatoire, tandis que la seule autre explication, la survenue d'une embolie amniotique, était une hypothèse imprévisible, exceptionnelle et considérée par les experts comme étant la moins probable ; que de ces constatations et appréciations, constitutives de présomptions graves, précises et concordantes, elle a pu déduire le lien de causalité entre les manquements reprochés à M. Z... et l'accident survenu ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur les deuxième et troisième moyens réunis, tels que reproduits en annexe :

Attendu qu'ayant constaté, par motifs propres et motifs adoptés, que M. Z... n'établissait pas que Mme Y... ou la sage-femme n'eussent pas donné l'alerte en temps voulu sur l'état de Mme X..., que c'est à lui qu'il appartenait d'appeler en temps opportun les deux anesthésistes présents dans l'établissement de soins, ce qu'il avait pu faire, que dès lors que ces deux praticiens l'avaient assisté afin de procéder à la réanimation de la patiente, rien ne justifiait qu'il n'eût pas été fait appel à l'un d'eux pour que la mère reste sous la surveillance constante d'un anesthésiste pendant la réanimation de l'enfant, et que le choix de la rachianesthésie, quand une anesthésie générale, moins risquée aurait pu être pratiquée dans la salle où avait lieu l'intervention, était entièrement imputable à M. Z..., la cour d'appel a pu estimer que ni l'établissement, ni Mme Y... n'avaient commis de faute en relation avec le dommage et qu'ils devaient être mis hors de cause ; qu'aucun des griefs n'est fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;